Il faut créer un organisme de contrôle de
la publicité argumentée sur la santé
Au vu de ce qui s'est passé aux Etats-Unis sur la manière
dont l'industrie des oléagineux a "littéralement"
huilé les Américains, en diabolisant les matières
grasses d'origine animale accusées d'être la source alimentaire
de cholestérol responsable du développement des maladies
cardio-vasculaires, avec les conséquences catastrophiques que
l'on connaît sur leur état de santé (surpoids, obésité,
diabète gras, cancer et autres affections dégénératives),
ainsi que sur l'inflation galopante des sommes consacrées au
traitement et à la prévention de ces maladies, il est
urgent d'informer le public de la réalité des risques
qu'il court à se fier aux conseils donnés à l'écran
ou dans les magazines en faveur de l'utilisation d'un produit alimentaire
sur leur état de santé et sur ceux qu'il ne court pas
à continuer à se nourrir selon des pratiques traditionnelles.
Dans la lutte qui a été engagée outre-Atlantique
pour lutter contre ces "maladies de la civilisation", on a
ignoré complètement certaines substances, qui sont à
la base même de toutes les interactions biochimiques au niveau
cellulaire : les acides gras. Dans la phobie d'ingérer un excès
de calories dans notre siècle d'abondance alimentaire, on a fait
la chasse aux lipides de l'alimentation en raison du fait qu'ils apportent
plus de deux fois plus de calories au gramme que les glucides et les
protéines, en oubliant que certains d'entre eux sont les constituants
des membranes de toutes les cellules de notre corps et de celles de
toutes les structures cellulaires où se déroulent les
réactions nécessaires aux processus vitaux. Plus grave,
certains acides gras entrent dans la constitution de certaines molécules
qui interviennent dans la régulation des réactions intracellulaires,
dans les communications intercellulaires. Or ces acides gras essentiels,
nos organismes ne savent pas les synthétiser, pas plus que celui
des autres animaux terrestres.
Au même titre que les vitamines, les acides gras oméga-3
sont des molécules indispensables à la vie et à
la santé, que nous devons trouver dans notre alimentation. Ce
n'est d'ailleurs pas une nouveauté en soi, puisque voilà
plus de 50 ans, on parlait déjà d'une certaine vitamine
F, mélange d'acides gras non saturés, dont les contours
et les sources n'étaient pas bien définis, mais dont on
connaissait déjà l'intérêt dans la prévention
et le traitement de certaines affections cutanées rebelles à
tout autre traitement.
Depuis quelques années, un groupe d'acides gras poly-insaturés
est devenu la coqueluche des tous les diététiciens américains
et, à leur remorque, de tous ceux qui s'occupent chez nous de
régimes alimentaires : ce sont les oméga-3, qui regroupent
un certain nombre d'acides gras à nombre élevé
de carbones (au moins 18), possédant au moins trois doubles liaisons
de leur chaîne carbonée, dont une en position 3 par rapport
au dernier carbone (carboxyle oméga) de la molécule.
Mais il faut se rendre à une évidence. Ce que l'on a
coutume aujourd'hui de désigner sous le vocable oméga-3
s'applique à diverses molécules qui n'ont pas la même
efficacité biologique, loin s'en faut. En particulier l'acide
linolénique, qu'il soit alpha ou gamma, présente en lui-même
un intérêt assez limité, s'il n'est pas transformé
par l'organisme de celui qui l'a ingéré en l'un de ses
homologues supérieurs, à savoir l'acide arachidonique,
et surtout en EPA ( EicosaPentaenoïc Acid) et en DHA (DocosaHexaenoic
Acid). Or cette transformation n'est pas efficace chez les jeunes enfants
et elle le devient de moins en moins au fur et à mesure que nous
prenons de l'âge.
Il y a peu de doute à ce que les oméga-3 ne soient d'une
importance capitale en nutrition humaine. Il suffit de rappeler que
des tissus comme le cerveau et la rétine contiennent 60% de DHA
et que, dans le sperme, le DHA représente 36,4% des acides gras.
On peut donc affirmer que les oméga-3 sont des acides gras indispensables
nécessaires à la vie, depuis la conception (vitalité
des spermatozoides?), durant la grossesse (développement cérébral?
autisme?) et l'enfance (enfants hyperagités?), et probablement
durant toute notre existence (prévention et traitement des maladies
cardio-vasculaires et dégénératives).
On sait à présent que le rapport oméga-6/oméga-3
est d'une importance capitale pour la santé et qu'il a été
profondément modifié, dans les sociétés
industrielles, à cause de l'augmentation considérable
de la consommation des huiles végétales riches en acide
linoléique (oméga-6). Mais il faut lever une ambiguïté
: ce n'est pas en remplaçant l'huile d'arachide ou de tournesol
de votre assaisonnement par l'huile du nouveau colza (canola) que cela
améliorera la nutrition de votre cervelle ou de votre fond de
l'oeil, même si cela ré-équilibre le rapport oméga-6/oméga-3
de votre régime alimentaire. Ce n'est pas non plus en se mettant
à l'huile de bourrache ou au pain à la graine de lin que
nous ferons régresser l'infarctus ou les troubles du rythme cardiaque.
Pour la plupart d'entre nous, notre état de santé, notre
espérance de longévité active, notre mémoire
et notre capacité de raisonnement sont liés à notre
bonne nutrition lipidique. Dans notre lutte pour lutter contre les kilos
excédentaires et la prévention de certains troubles de
nos organisme (taux sanguin de cholestérol un peu élevé,
pression sanguine un peu trop forte), nous avons essayé de manipuler
la biochimie de l'organisme de l'homme et nous nous trouvons devant
une grande ignorance sur notre compréhension du métabolisme
des lipides. Pratiquement chaque aspect du métabolisme de l'homme
dépend complètement de la nature des graisses qu'il consomme.
Pourtant l'opinion courante conduit le consommateur lambda à
croire que l'étiologie des maladies catastrophiques de notre
temps est en complète relation avec notre consommation de beurre,
d'oeufs et de viande.
La science et la médecine commencent enfin à prendre
en considération les déséquilibres relatifs à
notre alimentation en matière d'acides gras essentiels et la
relation avec certains troubles spécifiques de la santé.
On est même en mesure à présent de déterminer,
par analyse de la composition de la membrane des gobules rouges, quel
type d'acide gras est en cause dans un trouble donné.
Mais quand la pub pour les allégés ou les margarines
au phytostérol s'en mêle, on mesure le chemin qui reste
à parcourir pour le faire comprendre au public.