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N°33 / JUIN 2003

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Les Oméga-3 améliorent le QI des jeunes enfants

Par Richard N. Podell, médecin

Directeur du Podell Medical Center in New Providence, N.J

Le cerveau du nourrisson se développe très rapidement au cours de la première année de son existence, triplant son poids de naissance durant ces douze premiers mois. Pendant cette première année se construisent les structures nécessaires au développement de l'intelligence, de la vision et du langage. Considérant que le cerveau de l'homme est constitué de 60% de matière grasse, toute cette croissance cérébrale nécessite la fourniture de certains acides gras. Les aliments adéquats, qui contiennent ces acides gras, pourraient même procurer une intelligence supérieure aux nouveaux-nés.

Des expériences sur les animaux ont montré que l'une des raisons du manque d'intelligence est due à une carence en acides gras essentiels, en particulier la carence en acide docosahexanoïque (DHA) (1,2), que l'on trouve dans la graisse des poissons gras et certaines algues. Le DHA est un oméga-3, cousin de son semblable mieux connu du public, l'acide eicosapentaénoïque (EPA). Des études effectuées sur des jeunes enfants après la naissance commencent à apporter la confirmation du rapport entre le DHA et l'intelligence.

Le DHA et son homologue oméga-6, l'acide arachidonique, sont les acides gras les plus courants dans les neurones du cerveau des foetus et des tout jeunes enfants. Une déficience en DHA peut-elle provoquer des lésions du cerveau et une insuffisance de développement cérébral chez les humains? Il y a à présent certaines preuves que la réponse est OUI. Par exemple, les enfants nés avant terme présentent généralement un taux faible de DHA dans leur cerveau et ont plus de risques de présenter des toubles neurologique que la moyenne. (3) Les enfants hyperactifs ou présentant un manque d'attention ont également tendance à présentetr de faibles teneurs en DHA dans leur cerveau (4).

Ces observations suggèrent qu'il y a une relation de cause à effet entre la carence en acides gras essentiels durant l'enfance et les troubles neurologiques. Nous manquons toutefois de données et avons besoin de tests supplémentaires pour savoir si l'ajoût de DHA au régime alimentaire peut prévenir ou corriger les maladies mentales ou neurologiques.

Un article récent dans The Lancet a montré que la distributiion à des bébés d'une formule d'aliment enrichi en DHA permettait une amélioration de leur capacité à résoudre des problèmes à l'age de dix mois comparativement à des bébés ayant consommé la formule d'aliment standart du commerce, à faible teneur en DHA.

P. Willats, PhD, et ses collègues de l'Université de Dundee, en Ecosse, ont obtenu l'accord de 44 familles pur utiliser une formule enrichie en DHA sur des nouveaux-nés à terme, en pleine santé. Très vite après la naissance, la moitié des bébés furent alimentés avec une formule standart tandis que l'autre moitié recevait une formule enrichie en DHA et en acide arachidonique. Les graisses utilisées étaient des graisses laitières, des huiles végétales et des graisses d'oeufs.

A l'age de dix mois, les 2 groupes de nourrissons présentaient un développement physique analogue et les mêmes facultés de résolutions des problèmes. Néanmoins, confrontés à des épreuves un peu plus difficile pour leur âge, ceux qui avaient été alimentés avec la supplémentation de DHA s'en tiraient beaucoup mieux, de façon significative (5).

Dans cette étude, les bébés de 10 mois étaient testés de la façon suivante : on leur montrait un jouet placé sous un couvercle. Le jouet recouvert était placé sur l'extrémité d'une longue bande de tissu dont l'autre extrémité était à portée de l'enfant. Une barrière avait été posée entre l'enfant et cette extrémité de la bande de tissu. Pour prendre possession du jouet, les enfants avaient donc à résoudre ce problème à trois échelons.

Lors des 4 expériences réalisées, les deux groupes d'enfants testés montrèrent la même habileté à enlever la barrière et à commencer à tirer sur le tissu. Mais au troisième échelon, c'est-à-dire soulever le couvercle pour prendre possession du jouet, l'action était accomplie plus souvent par les enfants du groupe supplémenté en DHA.

Comme le QI des jeunes est directement relié à celui de leur plus tendre enfance, ces résultats montrent que la simple addition de certains acides gras aux formules d'aliments pour bébés pourrait améliorer le QI de millions d'enfants. Si d'autres études confirment et amplifient les résultats constatés par Willats et Al, les fabriquants d'aliments bébés se trouveront sous la pression d'ajouter certains acides gras essentiels à leurs produits, les rendant ainsi plus proches encore de la composition du lait maternel humain, qui est lui relativement riche en DHA.

Jusqu'à ce que cela soit réalisé, les femmes enceintes devraient-elles augmenter leur consommation de poisson ou absorber des compléments enrichis en DHA? Nous ne connaissons pas encore suffisamment pour pouvoir le dire. Bien qu'il n'y ait aucun effet secondaire connu suite à l'utilisation des formules enrichies en DHA, les suppléments à base d'huile de poisson ne sont pas recommandés pour les femmes enceintes et les enfants de moins de 5 ans. Certaines huiles de poisson contiennent des quantités élevées d'EPA et des quantités plus faibles de DHA. Chez les adultes, les deux acides gras sont utilisés. Mais chez les nourrissons et les foetus, on peut craindre que l'EPA puisse entrer en concurrence avec le DHA dans la formation des membranes des cellules nerveuses, rendant l'administration d'huile de poisson contre-productive durant le jeune âge. Les suppléments à base d'algues semblent mieux adaptés dans ces cas-là. Les femmes enceintes ou allaitantes devraient demander conseil à leur médecin ou à leur diététicien avant de prendre des suppléments alimentaires.

Le DHA est devenu l'objet d'attention depuis très peu de temps. On a accumulé plus d'expérience et de résultats à propos de l'EPA, un oméga-3 considéré comme efficace dans la prévention des troubles cardio-vasculaires, l'arthrite rhumatoïde et la maladie de Crohn. L'étroite relation qui existe entre les différents acides gras n'est pas encore complètement comprise. Mais ces recherches préliminaires prouvent que d'autres essais vont être mises en place, en particulier sur le sujet de l'augmentation potentielle possible de l'intelligence infantile.

Références bibliographiques

1. Crawford M. Are deficits of arachidonic and docosahexaenoic acids responsible for the neural and vascular complications of preterm babies? Am J Clin Nutr 1997;66(Suppl):1032S-41S.

2. Crawford M. The role of essential fatty acids in neural development: implications for perinatal nutrition. Am J Clin Nutr 1993;57(Suppl):703S-9S.

3. Makrides M. Are long-chain polyunsaturated fatty acids essential nutrients in infancy? Lancet 1995;345:1463-8.

4. Stevens L. Essential fatty acid metabolism in boys with attention-deficit hyperactivity disorder. Am J Clin Nutr 1995;62:761-8.

5. Willatts P, et al. Effect of long-chain polyunsaturated fatty acids in infant formula on problem solving at 10 months of age. Lancet 1998;352:688-91.