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N°24 / Février 2003

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Ce qu'on nous a raconté sur les graisses laitières est faux!

Une situation qui ne date pas d'hier et n'a fait qu'empirer depuis

On a l'impression que la mauvaise réputation des graisses animales, et du beurre en particulier, a commencé aux Etats-Unis dans le cours des années 1950. En fait, à l'époque, les Américains avaient déjà réduit leur consommation de cette catégorie de graisses. La modification de leurs habitudes alimentaires a fait le bonheur et la fortune de l'industrie des oléagineux. Elle remonte à la mise en vente sur le marché américain de la margarine dès les années 1900.

L'infarctus du myocarde était pratiquement inconnu aux Etats-Unis en 1910 et ne causait pas plus de 3.000 morts par an en 1930. En 1960, on constatait au moins 500.000 morts chaque année des suites d'une maladie cardio-vasculaire. La plus grande augmentation provenait de la rubrique infarctus du myocarde (MI), dû à un caillot de sang important conduisant à l'obstruction d'une artère coronaire et à la mort subséquente du muscle cardiaque irrigué par cette artère.

Depuis le début du siècle que le ministère de l'Agriculture des Etats-Unis tient des statistiques, nombre de scientifiques avaient noté un changement dans la nature des graisses que les Américains absorbaient. En 1946, les Américains consommaient encore à peu près 60 % de leurs graisses sous forme de graisses d'origine animale et 40 % seulement sous forme d'huiles végétales, hydrogénées ou non. Moins de 20 ans plus tad, en 1963, essentiellement sous l'influence de lobbies qui tiraient les ficelles et les bénéfices de la situation, les graisses animales ne rentraient plus que pour 40 % dans la consommation de graisses des Américains et les huiles pour 60 %.

En 1950, les Américains avaient déjà remplacé la moitié du beurre qu'ils consommaient par de la margarine. De 18 livres par personne et par an au début du siècle, la consommation de beurre était tombée à 10 livres. La consommation de "shortenings", matières grasses fabriquées à partir de graisses animales et végétales diverses, utilisées pour la friture ou dans la

fabrication des snacks et des produits de boulangerie, était restée stable à 12 livres par personne durant cette période, mais leur composition avait changé. On y avait remplacé les huiles tropicales naturelles de coco et de palme, solides à la température ambiante, ainsi que le suif et le saindoux (que l'on s'était mis à hydrogéner lui aussi pour qu'il ne rancît pas), par des huiles domestiques de coton, de maïs et de soja hydrogénées : c'était la guerre, et les transports maritimes des marchandises alimentaires autres que celles destinées aux militaires étaient trop risqués. La consommation d'huiles végétales avait plus que triplé, passant d'un peu moins de 3 livres par an à plus de 10 livres.

Dès cette époque, les statistiques mettaient le doigt sur une conclusion évidente : il fallait que les Américains revinssent à une alimentation plus traditionnelle, comprenant viande, oeufs, beurre et fromages, qui avait nourri leurs ancêtres, et fuir les aliments dernier-cri à base d'huiles végétales qui envahissaient les étagères des épiciers. Mais c'est les contraire qui arriva . Derrière le rideau de la scène, un petit groupe d'affairistes sans visage avaient décidé, dès 1946, de faire changer l'attitude des gens vis à vis des graisses du lait et de leur faire préférer la margarine.

En 1956, un appel de fonds dans le public par l'American Heart Association (AHA) fut diffusé sur les trois chaînes les plus importantes. Le Maître de Cérémonies (le présentateur) interviewait, entre autres, Irving Page, Jeremiah Stamler de l'AHA et le chercheur Ancel Keys. Les hommes du panel présentèrent l'hypothèse "lipidique" comme explication de l'épidémie de maladies cardiaques et lancèrent le concept du "Régime de Prudence" dans lequel huile de maïs, margarine, poulet et céréales remplaçaient beurre, saindoux, viande de boeuf et oeufs. La même année, l'industrie agro-alimentaire mit en route des campagnes de publicité pour vanter les avantages de ses produits : huiles végétales riches en acides gras non saturés et absence de cholestérol.

Les conséquences qui ont résulté de l'adoption du "régime de prudence"

Un telex de l'Agence Reuters daté du 1er janvier 2002 a pour titre : "Les statistiques indiquent que les maladies de coeur restent la première cause de mortalité." Près de 62 millions d'Américains ont une forme ou une autre de maladie cardio-vasculaire, et près d'un million en meurent chaque année.

Ces maladies sont la première cause de la mort Outre-Atlantique (958.755 décès en 1999), loin devant le cancer (549.838), les morts accidentelles (97.860), la maladie d'Alzeimer (44.536) et le SIDA (14.802). Elles représentent plus de 40 % de la mortalité totale, dont 167.366 décès dus à une attaque cérébrale. Prises à part des autres affections cardiaques, les attaques cérébrales représentent la troisième cause de tous les décès. Pourtant, ce n'est pas faute d'avoir averti le public. Ce n'est pas parce que les personnes à risques sont mal suivies médicalement : en 1999, 85 % des victimes d'un infarctus étaient traités aux bêta-bloquants dès leur sortie d'hôpital. En 2001, le coût total du traitement et de la prévention des maladies cardiovasculaires aux Etats-Unis a été de 292,8 milliards de dollars, soit 2.100 milliards de francs, quelque chose comme le double des dépenses de santé remboursées par notre Sécurité Sociale en France.

Si le régime de prudence n'a pas été efficace dans la prévention des maladies cardio-vasculaires, il est par contre à l'origine de conséquences tout aussi dramatiques sur la santé des Américains. A trente ans, plus de la moitié d'entre eux sont devenus obèses et 60 % en surpoids. Les citoyens de l'Oncle Sam sont plus gras que jamais et les kilos s'ajoutent aux kilos à un âge toujours plus jeune. Un récent rapport montre que 27 % des Américains adultes entre 20 et 74 ans sont obèses lorsqu'ils atteignent le milieu de leur trentaine, à peu près le double de ce qu'il en était au début des annnées 1960. Au total, 61 % des adultes de ce pays sont obèses ou en surpoids par rapport a un Index de Poids Corporel (IM), ou Body Mass Index (BMI)* supérieur à 30. Les femmes et les minorités ethniques présentent un risque accru d'obésité.

Le BMI* est le rapport du poids d'une personne (exprimé en kilos) avec le carré de sa hauteur (exprimé en mètres). Il peut très adéquatement prédire le risque de complications médicales dues à l'excès de poids. Un BMI supérieur à 30 par exemple est associé à un risque accru de maladies cardio-vasculaires, à certains types de cancer, d'hémorragie cérébrale et de diabète gras.

Les scientifiques ont montré à quelle vitesse de jeunes adultes deviennent obèses. Les personnes qui sont nées en 1964 deviennent obèses 26 à 28 % plus vite que celles nées en 1957. Les résultats soulignent même la nécessité du contrôle de poids des jeunes adultes en léger surpoids. Selon ce rapport, 80 % des adultes obèses à 35 ans ont commencé à présenter un excès de poids entre 20 et 30 ans et certains plus jeunes encore, durant leur adolescence.

Ces données ont été établies à partir de l'information collectée sur plus de 9.000 personnes vivant aux Etats-Unis, rapportant chacun 12 fois leur poids et leur hauteur durant une période de 17 ans. Du fait que les gens ont souvent une tendance à sous-estimer leur poids réel, il est probable que ces résultats soient au dessous de la vérité.

Malgré tous les efforts faits pour tirer la sonnette d'alarme sur l'obésité et le diabète gras, l'augmentation de ces deux maladies continue à grande vitesse. Dans le Mississipi par exemple, près de 25 % de la population est obèse et près d'un adulte sur 4 présente un BMI supérieur à 30. 7,3 % des Américains souffrent à présent de diabète gras, score probablement bien inférieur à la réalité si l'on prend en considération les cas non diagnostiqués, ce qui pourrait faire monter le pourcentage réel à 10 %

Cette situation est d'autant plus tragique que le tendance pourrait être inversée relativement facilement, si les Américains revenaient à leur alimentation traditionnelle, plus riche en graisses animales, soient-elles saturées. Car il y a peu de doute : on commence à constater par là le résultat de l'élimination des graisses traditionnelles présentes dans le beurre, la crème, les fromages et les oeufs dans l'alimentation des Américains et leur remplacement par de l'huile de soja, de maïs ou de coton, hydrogénées ou non.

Sans oublier que la chasse au cholestérol alimentaire a abouti à mettre sous médicaments à vie un pourcentage élevé de la population, sans aboutir à la moindre augmentation de la longévité de ceux qui se soumettent aux prescriptions et aux régimes préconisés par les médecins Outre-Atlantique.

Pour conclure, il convient de laisser la parole à Maria Enig, la spécialiste de renommée mondiale en matière de graisses à l'Université du Massachussets : " Le problème avec ces 40 années de recherche sur les lipides, le cholestérol et les maladies cardio-vasculaires sponsorisées par le NHLBI, c'est qu'elles n'ont pas apporté beaucoup de réponses, tout au moins de celles qui eussent pu donner satisfaction à cet organisme... Même pour les individus présentant des taux extrêmement élevés de cholestérol, jusqu'à 1.200 mg/dl, la différence dans le risque d'accidents cardiaques était infime comparée avec ceux qui avaient un taux normal." L'Enquête du NHLBI sur l'Intervention des Multiples Facteurs de Risque étudia la rapport entre les maladies de coeur et le taux de cholestérol de 362.000 hommes et constata que la mortalité par an due aux accidents cardiaques variait de légèrement moins de 1% pour moins de 140 mg/dl à un peu plus de 2% pour des teneurs supérieures à 300 mg/dl, une différence insignifiante. Un résultat inattendu des trouvailles du MRFIT, dont les médias oublièrent de parler bien entendu, était que la mortalité due aux autres causes -cancer, accidents, maladies infectieuses, troubles rénaux - était significativement plus élevée chez les hommes dont la teneur en cholestérol était en dessous de 160 mg/dl.

Aujourd'hui encore, les accidents cardiaques sont la première cause de mortalité dans les pays développés. Si la mort par infarctus semble avoir diminué, c'est que le risque a pu être mieux évalué depuis une dizaine d'années et que la chirurgie des pontages a permis une réduction des accidents les plus dramatiques. Mais la mise en régime réglé de tout un pays n'a pas amené la réduction des risques cardio-vasculaires attribués un taux élevé de cholestérol sanguin, et il a fondamentalement changé le tableau de l'obésité dans ce pays.

Pourquoi en est-on arrivé là?

Une étude publiée récemment a comparé les résultats des statistiques publiées en 1977- 78 (Nationwide Food Consumption Survey) avec 3 enquêtes en continu réalisées en 1996 sur un échantillon de 63.380 personnes agées de 2 ans et plus, réparties sur tout le territoire américain, en calculant la quantité moyenne de calories ingérées à domicile, dans les restaurants et dans les fast-foods pour chacune des années d'études.

Entre 1977 et 1996, pour le même prix, l'apport calorique d'une portion achetée ou servie a augmenté de 93 calories pour les snacks salés, de 49 calories celle d'une boisson sucrée (soft drink), de 97 calories pour un hamburger, de 68 calories pour la portion de frites et de 133 calories pour la portion de Mexican Food. Les groupes de tout âge fréquentent les restaurants bon marché et les fast-foods plus souvent que dans la génération précédente. L'ingestion d'énergie par l'intermédiaire des snacks est passée de 11,3 en 1997 pour cent à 17,7 % en 1996, une augmentation de plus de 50%.

Combinés avec une diminution de l'activité physique au cours de ces deux décennies, ces changements alimentaires sont responsables de l'épidémie d'obésité et de diabète à laquelle les Américains ont à faire face. L'augmentation de consommation d'énergie augmente de façon significative les risques de maladies cardio-vasculaires, d'hémorraies cérébrales, d'hypertension et de nombreuses autres maladies.

Il est clair que les Américains mangent trop. Ils mangent trop parce qu'ils ont faim. Ils ont faim parce qu'ils se "nourrissent" mal.

Plus de 50 éléments sont essentiels pour rester en bonne santé. Chacun de ces éléments, notre organisme doit trouver le dans son alimentation de tous les jours. Et presque tous ne sont pas interchangeables.

Or les modifications des habitudes alimentaires, l'augmentation de la productivité en agriculture et la façon de préparer les denrées nécessaires à notre alimentation se sont traduites par des carences d'apport de nombre de ces éléments indispensables. Si un seul de ces éléments est complètement absent du régime, il en résulte la maladie et la mort prématurée. Certains groupes humains sur notre planète terre vivent traditionnellement jusqu'à plus de 100 ans. L'étude de ces sociétés a montré que ces sociétés agraires trouvent les 50 éléments dans leur alimentation, en raison des circonstances particulières dans lesquelles elles vivent. Leur environnement n'est pollué ni par les engrais chimiques, ni par les pesticides, et l'air qu'elles respirent et l'eau qu'elles boivent peuvent être qualifiés de purs. Ils ne connaissent pratiquement ni le cancer, ni les maladies cardiaques.

Aux Etats-Unis, en 1900, seulement 3,3 % de la population mourait du cancer. Nous en sommes aujourd'hui à 25 % et les maladies cardiaques sont responsables de la mort de près de 15% des Américains. On aurait pu penser que ces chiffres allaient être beaucoup plus faibles et qu'ils devraient diminuer en raison de l'amélioration de l'hygiène, de la lutte efficace contre les maladies infectieuses apportée par la découverte des antibiotiques, des méthodes actuelles de production et de distribution . C'est le contraire qui s'est produit. Qu'on n'aille pas nous raconter que c'est seulement l'augmentation de la durée moyenne de la vie, qui est responsable du développement des cas de cancers. Il n'est que de jeter un oeil aux statistiques sur la mortalité due aux cancers du sein chez les jeunes femmes, pour être convaincu du contraire.

C'est l'équilibre de notre alimentation qui est le seul moyen de lutter contre l'excès d'ingestion de calories, l'organisme de celui qui est carencé cherchant à compenser, par un surplus de consommation, un ou plusieurs éléments indispensables qu'il ne trouve pas ou pas assez dans le régime alimentaire qu'il ingère au fil des jours. Chacun des repas que nous prenons doit apaiser la faim qui nous a poussé à nous mettre à table. Si cette satiété n'est pas obtenue par l'ingestion de la quantité de calories que nous pouvons dépenser au travers du fonctionnement de notre corps, de la dépense occasionnée pour le maintien de sa température interne et de son activité musculaire, cette faim va persister ou réapparaître précocement, avant l'heure normale du repas suivant et pousser au grignotage. Pas besoin d'aller chercher ailleurs.

Réhabiliter les graisses du lait

Il serait fastidieux de répertorier tous les résultats des recherches qui ont donné lieu à une interprétation tendancieuse ou erronnée par les tenants de l'hypothèse lipidique, la thèse qui a été à la base de ce qu'est devenue l'alimentation de nos amis Américains, ainsi que ceux des enquêtes effectuées sur les populations ayant gardé leur alimentation traditionnelle, et dont les résultats embarassent fortement les "dictocrates du régime" (Sally Fallon).

Bornons nous à considérer ce qui se passe en France et à expliquer ce que les Américains ont baptisé le "French Paradox". Malgré une consommation de graisses saturées considérable sous la forme de beurre, de crème, de fromages, d'oeufs, de foie, de viande grasse et de charcuteries riches (pâtés, saucisses), les Français ont un pourcentage de maladies cardio-vasculaires bien plus faible que les Américains : 145 infarctus pour 100.000 habitant d'âge moyen contre 315 en Amérique. Dans le Sud-Ouest de la France, où le foie gras, les confits et la cuisine à la graisse d'oie sont des éléments incontournables du régime alimentaire, il est seulement de 80 pour 100.000 par an, 4 fois moins qu'aux Etats-Unis. Il est vrai que les Crétois font encore mieux avec seulement 38 cas pour 100.000 habitants.

En matière de produits laitiers, le Français a consommé, en l'an 2000, 8,3 kg de beurre, 23,6 kilos de fromages, 3,9 kilos de crème et 75,5 litres de lait, soit l'équivalent de 21,8 kilos de graisses butyriques. Près de 3 fois plus que les 8,3 kg de l'Américain (1,9 kg de beurre, 13,1 kg de fromages, 3,7 kg de crème et 98,9 litres de lait). (source CNIEL)

Naturellement, les produits laitiers ne sont pas responsables à eux seuls de cette heureuse situation. En fait, la France n'est qu'un des élèves les plus doués du "paradoxe méditerranéen", dont le paradygme reconnu est le régime crétois. "Un manichéisme simplificateur en attribue le bénéfice exclusivement à l'huile d'olive." écrit Jean-Marie Bourre de l'Inserm, dans une brochure du CERIN. "Or, celle-ci ne saurait expliquer la totalité du " Paradoxe Français ". Ne serait-ce que parce que cette huile ne fournit que... 2 % environ des calories dans la ration alimentaire des Français ! Cette quantité est trop faible pour tout expliquer; pour agir en quantité si restreinte. Il faudrait qu'elle " recèlât un médicament " (comme l'huile de poisson qui est riche en oméga-3), mais il y a sans doute longtemps qu'il aurait dû être découvert. L'acide oléique qu'elle contient (comme de multiples autres aliments) est certainement intéressant, sinon obligatoire ; sa présence éviterait la consommation d'autres graisses, pensent certains."

Ce ne sont ni le cholestérol, ni les acides gras saturés des graisses du lait qui présentent un risque pour notre coeur ou pour nos artères. Il est bien évident que le cholestérol du lait n'est pas de nature à jouer un rôle essentiel dans l'ingestion journalière de cholestérol. En dehors des glaces à la crème, une portion de n'importe quel produit laitier procure seulement 2 à 11% de la quantité de cholestérol alimentaire recommandée journellement (300 mg/jour), en se rappelant que la totalité du cholestérol alimentaire ne peut provenir que des denrées d'origine animale. La quantité de cholestérol que l'on peut ingérer grâce à (ou à cause) des produits laitiers consommés tous les jours, y compris le beurre, ne représente que 20 à 30 % du cholestérol alimentaire que l'on est susceptible d'ingérer dans un régime "normal". Alors, remplacer les 30 ou 40 grammes de graisses laitières journalières, apportant quelque 75 à 100 milligrammes par jour de cholestérol, par 20 grammes de margarine contenant 2 grammes de phytostanols hydrogénés chimiquement, sous prétexte de faire ainsi baisser de 10 % un cholestérol LDL supérieur à 1,5 grammes par litre de sérum, j'aimerais bien savoir quel effet à long terme on peut attendre de cette cuisine là sur la santé de mes artères et de mon cerveau....

Quant aux acides gras saturés, seuls ont été considérés comme hypercholestérolémiants les acides laurique (C12:0), myristique (C14:0) et palmitique (C16:0) qui ne représentent que 40% des graisses du lait. Là aussi, on peut faire la critique des publications qui ont donné lieu à cette interpétation. Berner a fait cette critique des études utilisant une seule source de matières grasses pour faire la comparaison des effets des graisses sur les lipides du sang. A l'évidence, les effets résultant de n'importe quelle graisse distribuée exclusivement vont se trouver dilués quand elle est mélangée dans une ration diversifiée. Citant Ramsey et Al, beaucoup d'experts s'attendent à des conséquences irréalistes sur l'influence d'une modification d'un régime alimentaire, parce qu'ils se fient à "une interprétation trop stricte des expériences à court terme, des études contrôlées de régimes stricts sur des populations sédentaires et des observations non rigoureuses". Berner en conclut que la recommandation usuelle d'apport par les graisses d'un maximum de 30% de calories dans la ration journalière grâce à 10% d'acides gras saturés, 10% d'acides gras mono-insaturés et 10% d'acides gras poly-insaturés, bien que pouvant avoir une influence positive sur la diminution dans le sang du cholestérol total et du LDL cholestérol, a de sérieux défauts :

- ces recommandations ne tiennent pas compte des effets de ces rations sur le HDL cholestérol et sur la teneur en apoprotéines;

- elles ne tiennent pas compte non plus des effets des modifications de l'ingestion des acides gras sur les paramètres autres que les lipides sériques et les lipoprotéines, comme par exemple l'oxydation des LDL et la tendance à la thrombose;

- classer un acides gras dans l'une des trois catégories (saturés, mono-insaturés et poly-insaturés) ne rend pas compte que tous les acides gras d'un même groupe n'ont pas la même influence physiologique;

- enfin elles oublient les effets probables de certains composants des graisses laitières : les CLA, la sphingomyéline, l'acide butyrique et les ethers du glycérol qui jouent un rôle dans la défense de l'organisme contre certains cancers (Parodi, 1997).

Les recherches récentes sur les graisses du lait montrent qu'elles sont efficaces dans la prévention et le traitement du cancer

Parodi a résumé succintement la contribution des composants des graisses laitières de la vache comme agents anti-cancéreux potentiels. L'agent anticancéreux le mieux caractérisé à l'heure actuelle est l'acide linoléique conjugué, terme générique pour un groupe d'isomères diénoïques conjugués (possédant deux doubles liaisons) de l'acide linoléique. Le mieux connu, et aussi le plus abondant dans le lait des vaches, est le cis9-trans-11 acide octodécanoïque (acide gras à 18 atomes de carbone). On lui a donné le nom d'acide ruménique, parce qu'on le trouve en abondance dans la graisse des ruminants et que c'est un intermédiaire de la biohydrogénation de l'acide linoléique dans le rumen.

Chez les souris de laboratoire, les CLA (Conjugated Linoleic Acids) se sont montrés efficaces pour protéger contre l'induction et le développement des tumeurs de la peau, de l'oesophage, du colon, de la prostate et de la mammelle. Tout récemment, on a montré que des souris nourries avec du beurre durant la période précédant la puberté avaient des teneurs tissulaires en CLA plus élevées, une quantité de cellules épithéliales mammaires inférieure et une apparition des tumeurs mammaires induites chimiquement réduite de 53%; (Ip et Al, 1999). Il a été démontré que les CLA inhibaient la prolifération des cellules bourgeonnantes, qui sont la cible des agents de la cancérisation mammaire. Le beurre enrichi en CLA "naturels" présentait une plus grande efficacité qu'une dose égale de CLA d'origine synthétique.

Bien que les CLA aient attiré beaucoup d'attention de la part des scientifiques spécialisés dans les produits laitiers, la nutrition et la médecine, d'autres composants du lait ont aussi des effets biologiques avec des propriétés anti-cancéreuses. La sphingomyéline en particulier, présente dans la membrane des globules gras, et dont le babeurre est particulièrement riche, contient des composant biologiquement très actifs, comme la céramide et la sphingosine. Ils sont utilisés dans trois mécanismes antiprolifératifs en inhibant la croissance cellulaire et en facilitant l'apoptose (mécanisme programmé de la mort cellulaire).

L'acide butyrique du lait réprésente 3 à 5% des acides gras du lait, et 10% des molécules d'acides gras qui ont une puissante action inhibitrice de la croissance cellulaire et qui induisent l'apoptose de plusieurs lignées cellulaires de cancer. La plus grande attention lui a eté donnée pour son rôle dans la prévention du cancer du colon. L'efficacité la plus grande du butyrate semble associée à la distribution conjointe de vitamines liposolubles (Parodi, 1997). Les preuves définitives sur l'efficacité du butyrate comme agent anti-cancéreux restent à administrer.

Les ethers lipidiques présents dans les graisses du lait sont facilement absorbés et présentent des propriétés anti cancéreuses in vitro sur les cultures de cellules. Mais aucune efficacité n'a été démontrée dans les essais cliniques (Parodi, 1997).

Parodi (1997) a noté un certain nombre de preuves partielles de la diminution du déclenchement (induction) des tumeurs sur les animaux d'expérimentation nourris avec du beurre en comparaison avec d'autres types d'huiles ou de graisses.

Pour conclure...

La composition de la graisse du lait est à présent un objet fondamental des recherches effectuées en matière de nutrition et de santé de l'homme. Il y a plus de 400 acides gras différents contituants de la graisse du lait. Et ce que l'on sait déjà de certains d'entre eux va bien au delà des idées généralement admises de l'importance de certains acides gras que l'on a appelés indispensables ou essentiels, les omega-6 et les omega-3, en matière de la nutrition de l'homme.

Quelques-uns seulement des 400 et plus des constituants du lait ont vu leur activité biologique étudiée à l'heure présente. De toutes récentes recherches ont prouvé que certains composants des graisses laitières avaient des propriétés anti-cancéreuses importantes (Parodi, 1997). Ces propriétés anticancéreuses des acides gras connus sous le nom générique d'acides linoléiques conjugués (ou CLA), CLA ont été découvertes par hasard.

D'autres composants des graisses du lait comme les sphingomyélines, ou l'acide butyrique et les ethers du glycérol, ont provoqué un nouvel intérêt et une accélération des recherches sur la synthèse et la composition des matières grasses du lait. Il est aussi vraisemblable que d'autres éléments des graisses laitières restent à identifier et qu'ils ont des effets biologiques et sanitaires très importants.

Quelles autres découvertes importantes en matière d'activités biologiques des graisses du lait restent-elles à faire, si des recherches coordonnées sont entreprises à leur propos? L'avenir des graisses laitières est en réalité très prometteur, tant en matière de sujets de recherche qu'en tant que composant des régimes alimentaires procurant la santé chez l'homme.