n°14
Affaire Buffalo Grill (suite)
Un complot ?
Trois jours après une intervention pour le moins inopportune, j'en
suis encore à me demander ce que ce Monsieur Renaud Dutreil, ministre
d'un gouvernement qui a l'ambition de remettre de l'ordre dans la boutique
France, est venu faire dans ce pataquès !
Il ne suffisait pas qu'une jugette (à moins que ce n'ait été une "jugeuse")
ait envoyé deux présumés peu coupables derrière les barreaux de notre
système carcéral, les lampistes du vaudeville, et deux autres, dont
le PDG initiateur de la seule chaîne de fast-foods à la française qui
ait quelque notoriété, en examen scrupuleux et prolongeable à merci
(de la justice), voilà que l'inconnu de la veille fait la Une des journaux
télévisés et l'éditorial de toutes les feuilles de chou d'arrondissement.
Aurait-il voulu attiser une étincelle qui couvait que le pompier de
service n'aurait pas fait pire.
Car il faut bien remettre les choses en situation.
Il y a quelque deux ans à présent, une association s'est créée pour
la défense des intérêts des victimes de la maladie due au nouveau variant
de la Maladie de Creutzfeldt-Jacob. Cette affection fatale avait tué
en France 2 personnes au cours des deux ou trois années antérieures
(à moins que ce ne fût au cours des quatre ou cinq précédentes). Elle
a mandé un avocat parisien, Maître Honnorat, qui est apparu nombre de
fois devant les caméras pour faire savoir à ses concitoyens qu'il demandait
(au nom de familles des victimes naturellement) à la justice de faire
toute la lumière sur la nature des mesures qui avaient été prise pour
prévenir le développement de "l'épidémie" qui sévissait en Grande-Bretagne
: on devait en être Outre-Manche à quelque chose comme 85 victimes entre
1995 et fin 2000, dont une bonne douzaine non confirmées par les analyses
de laboratoire.
Il n'y avait là rien de très original, les familles des victimes britanniques
de la même hypothétique maladie ayant de leur côté attaqué en justice
leurs autorités administratives. Ce qui d'ailleurs ne tient pas debout,
à l'examen chronologique des mesures mises en place dès 1988 par le
gouvernement de Sa Majesté.
Apparemment, ces familles anglaises sont rentrées dans la quiétude
puisque, si mes informations et mes souvenirs sont bons, le gouvernement
anglais a atttribué quelque 300.000 livres à chacune d'entre elles pour
prix de leur douleur (et de leur discrétion?).
Donc, Madame le juge Marie-Odile Bertella-Geoffroy, sans doute ignorante
du fait bien établi à présent que personne n'ait jamais pu, jusqu'à
ce jour en tous cas, contaminer expérimentalement un animal en lui faisant
manger de la viande d'un animal atteint de la maladie de la vache folle,
a découvert (sans le prouver naturellement), un lien entre l'ingestion
des hamburgers "frelatés" servis chez Buffalo Grill et le développement
de la maladie dont la variant de la maladie de Creutzfeldt-Jacob serait
l'agent. Et voilà qu'elle en fait peu ou prou des assassins présumés,
sinon avérés. On est en plein délire.
Notre Sherlock Holmes en jupons ferait bien de s'adjoindre un Docteur
Watson en bon sens pour diligenter une enquête à très haut risque (sauf
pour elle sans doute). Et notre Secrétaire d'Etat à la Consommation
et à la Répression des Fraudes aurait belle à rester discret sur un
sujet dont personne, et surtout pas les experts de la ligne officiellle,
ne connait vraiment les tenants et les aboutissants.
Quant à moi, qui n'ai jamais mis les pieds dans un Buffalo Grill, j'y
vais de ce pas en compagnie de mes petits-enfants. Avec l'espoir qu'il
reste quelqu'employé oisif pour y faire la popote : il paraît que leur
inculpé de patron les a mobilisés pour manifester à Paris.
Avec aussi l'espoir de m'y régaler. Après tout, et à condition de n'en
point abuser, les fast-foods ce n'est pas toujours si moche...