n°12
Le billet matinal d'Isidore
La jugette a manqué de jugeotte !
Garde au moins tes dernières illusions, Isidore !
Bien que très familier des errements de notre justice, tu es fondé
à ne pouvoir attribuer qu'à l'inexpérience ce pas de clerc d'une féminine
de juge d'instruction . Une vieille briscard d'enquêteuse n'en serait
pas venue à ce degré de ridicule : sans la récente application de la
réforme "judicieuse" concoctée de longue date par notre-ex ministre
de la justice, il est bien possible que le PDG de la troisième banque
de l'héxagone ait passé la première nuit de son existence derrière les
barreaux. Tu vois quel chari-vari médiatique nous a épargné la belle
Elisabeth !
Si je me fie au jugement public de Laurent Fabius, un homme fort civil
au demeurant, il semble que ce soit un type très bien, ce Monsieur.
Bien que que je n'aie pas toujours eu des relations cordiales avec quelques-uns
de ses collaborateurs, coupables d'initiatives discutables à mon endroit,
d'ailleurs reconnues par le versement d'un chèque de la dite banque
d'un montant de 3.000 francs, chèque dont je me suis défait au plus
vite pour le faire encaisser par le Crédit Agricole et dont je tiens
le fac-similé à la disposition des curieux, je me suis interrogé sur
cette précipitation des médias, relayeurs coutumiers des informations
émises par nombre de juges d'instruction en mal de notoriété, dignes
émules de la façon d'opérer des Halfen, et autres Laurence Viesnewski,
et aussi de certain procureur Stemlach, dont la conférence de presse,
tenue au tribunal de Bernay le samedi 22 octobre en début d'après-midi,
a été l'étincelle qui a déclenché "l'affaire de la vache folle 2000".
Moins de 24 heures après le début de leur interrogatoire par la Police
Judiciaire de Rouen, trois négociants à bestiaux à la réputation d'honnêteté
bien établie dans leur rayon d'activité, se sont vus accusés d'avoir
"dissimulé parmi 36 bêtes saines un animal atteint de la maladie de
la vache folle" et deux d'entre eux dare-dare écroués, l'un à la prison
Bonne Nouvelle de Rouen et l'autre à celle d'Eveux, desquelles il n'a
pas fallu moins de 7 manifestations de centaines déleveurs à Rouen,
Evreux et Bernay, pour parvenir au bout de 7 semaines, à les sortir
des cellules où on les avait incarcérés, remis en liberté sous contrôle
judiciaire et interdits d'exercice de leur profession. J'ai été suffisamment
impliqué dans l'obtention de leur "libération sous conditions" pour
avoir eu l'occasion d'écrire un livre sur le non-événement que constituaient
les faits incriminés.
Plus de 15 mois après, j'espére encore que la "justice" va enfin établir
les chefs d'accusation qui ont motivé la conduite du procureur, et la
convocation des "coupables" au Tribunal de Bernay. Eux auussi partagent
mon impatience : à ce jour, ils doivent encore satisfaire aux exigences
du contrôle imposé par le caractère provisoire de leur mise en liberté
en se présentant à la brigade de gendarmerie de leur domicile, sont
interdits d'exercer leur activité, qui est aussi leur gagne-pain, et
ne peuvent commercialiser des animaux dont les documents ont été confiqués
par les Se(r)vices Vétérinaire départementaux, qui se refusent à la
restituer. Satisfaites de l'aubaine, les bestioles épargnées broutent
consciencieusement et paisiblement la pitance que, bons princes, leur
distribuent nos deux malfrats : elles au moins ne sont pas folles !
Le Procureur Stemlach est à présent parti exercer sa verve come sous-préfet
dans le Bas-Rhin, à moins que ce ne soit dans celui du Haut. Son complice
dans le chari-vari, ex préfet d'Evreux à l'époque, est à présent domicilié
à Vannes (préfet toujours en exercice). Le juge d'instruction a été
déchargé de l'affaire à sa demande, muté et remplacé. Les médias ne
se soucient guère du sort de ceux dont ils ont oublié jusqu'au nom,
les éleveurs sont pratiquement en faillite, le bifteck a subi une hausse
de près de 20% pour financer les contrôles de santé et d'identité des
carcasses avant l'emploi, les côtes à l'os ont diparu des étals, le
ris de veau de nos casseroles, les véritables bouchées à la reine de
nos assiettes. Cantines et fast-foods se sont adonnés aux hamburgers
concoctés à partir de carcasses d'animaux importées d'une trentaine
de pays différents, à l'exclusion de celles que voudraient bien nous
refiler les Englishes. L'interdiction d'importation de viandes de boeuf
anglaise donnée aux professionnels habilités va nous valoir condamnation
et indemnisations compensatoires. Justifiées d'ailleurs : leurs abattoirs
ne sont pas forcés de comprendre que nous leur refusions de ne pas consommer
de viandes d'animaux provenant d'un cheptel qui est moins contaminé
à présent que celui de la France, tout au moins à ce qui se dit. Il
est vrai que nous ne contrôlons pas dans la même catégorie. Enfin nous
en sommes toujours, et très heureusement, à attendre le développement
de l'épidémie qui n'a jamais existé, la nouvelle variante de la Maladie
de Creutzfeldt-Jacob, contre laquelle l'Europe est en train de dépenser
des milliards (d'euros) et en vertu de laquelle on est en train de bourrer,
jusqu'aux poutres du toit, tous les abris disponibles pour stocker des
farines de viande de grande valeur biologique et économique pour nourrir
des crevettes et des canards, et dont on ne sait aujourd'hui si, à l'égal
des déchets radioactifs produits chaque jour par nos centrales nucléaires,
on pourra jamais se débarrasser...
Pour en revenir à mes premiers moutons susceptibles parait-il de trembler
pour cause d'incubation de vache-folies, je me demande quand même si
l'inspiratrice de ma chronique matinale a eu raison de vouloir se faire
un nom sur ce genre de vétille. A l'heure où les opérations bancaires
se font par ordinateurs complices, est-il raisonnable de demander à
l'un des PDG les plus importants de notre pays de passer des nuits blanches
à déceler la couverture de noires turpitudes ? A devoir contrôler les
millions de chèques pas clairs susceptibles de blanchir de l'argent
sale, il ne va certainement plus voir la vie en rose.
A présent 70 % des élèves de l'Ecole de la Magistrature sont des femmes.
Apparemment, elles ont de grandes ambitions de réussir, ce qui n'est
pas étonnant : elles sont en général plus sérieuses, plus persévérantes,
plus courageuses aussi que leurs collègues mâles. Mais les femmes, malgré
qu'elles en dient, elles ne sont pas tout à fait bâties comme les hommes.
Leur nature plus fragile, plus portée à l'excuse de la faute est parfois
débordée par leur sensibilité, leur émotivité, leur révolte face aux
injustices. Elles gardent certains complexes d'avoir eu à batailler
pour arriver à faire reconnaître leur recherche légitime d'égalité.
Elles sont parfois portées à s'emporter, pour faire changer un cours
des choses qu'elles refusent, pour combattre les injustices. L'enseignement,
la médecine sont des professions qui se féminisent féminisent à une
vitesse inimaginable . Au moment où on constate le rôle irremplaçable
de pères dans l'éducation de ses enfants, il serait peut être judicieux
de songer à respecter, à rétablir une certaine parité dans certaines
composantes de nos sociétés.
Ne serait-il pas grand temps de remettre les pieds sur terre ?