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n°10

le 30 mai 2002

Lettre ouverte à un journaliste

Cher Monsieur,

Comme la plupart des journalistes, vous avez été abusé par les scientifiques en charge du dossier de la vache folle.

Après le retour de la viande de boeuf britannique dans nos assiettes, l'arrêt partiel du massacre de troupeaux entiers suite à une recherche systématique de prions erratiques, qui n'a d'autre justification que de rassurer des consommateurs "mésinformés" sur la réalité du risque éventuel qu'il risquent de courir, après la possibilité qui nous est enfin rendue de consommer du ris de veau dont le propriétaire n'avait que le défaut d'avoir été nourri avec des aliments remplaçants du lait à base de suif de boeuf, il serait temps d'informer objectivement les consommateurs de la réalité de la situation : pour continuer à consommer comme nous le faisons à présent dans un environnement de gaspillage, il est urgent de recycler les carcasses de dinde dont nous ne poêlons à peu près plus que les escalopes, celles des poulets dont nous n'ingérons plus que les blancs, les pilons et les moignons d'ailes, les coffres et les têtes des lapins dont nous ne cuisinons plus que les rables. Et ce recyclage il ne peut se faire que par la ré-introduction des farines fabriquées avec ces "déchets" dans les aliments du bétail destinés aux porcs, aux volailles, aux chiens et aux chats, au poissons d'élevage... et aux petits zoiseaux.

N'en déplaise à Noël Mammère, ce politique qui a fait ses classes dans votre corporation, je préfère risquer d'attraper une maladie improbable, que d'avoir à respirer la dioxine qui sera émise dans l'air par les fours crématoires sensés éliminer des denrées supposées dangereuses. Quant aux risques du stockage de centaines de milliers de tonnes de matières alimentaires putrescibles et bien appétissantes pour les rôdeurs et les rongeurs, mieux vaut n'en pas parler.

Comme vous avez participé au façonnage de l'opinion de vos lecteurs, ayant abouti à la mise en place des mesures sans objet, qui entraînent la ruine des éleveurs français et aboutissent à surpayer le bifteck de notre quotidien de 1 à 2 euros de plus au kilo, je vous verrais très bien prendre la tête d'une opération d'information du public destinée à lui faire changer d'attitude et rapporter certaines mesures non justifiées à présent que les peurs des années 90 se révèlent sans fondement. Car il ne faut pas compter sur des politiciens frileux pour sortir de l'impasse. Ils est d'ailleurs invraisemblable que les "scientifiques" qui se sont trompés, et qui nous ont trompés, soient si discrets sur l'évolution des évènements et ne reconnaissent pas publiquement l'erreur qui a été commise en matière de l'évaluation du risque et de l'application erronnée d'un principe de précaution dont il faudra bien, un jour ou l'autre, mieux définir les contours.

Je crois bien que, une fois de plus, je suis en train de prêcher dans le désert, mais j'ai quand même un petit espoir (tout petit-petit!).

Je vous prie de croire néanmoins, cher Monsieur, que j'appécie en général votre façon d'aborder les sujets dont vous traitez.

Maurice LEGOY

Docteur-Vétérinaire